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INTERVIEWS

INTERVIEW AVEC BILL MUDGE, RÉALISATEUR DE "BEATING SUPERBUGS, CAN WE WIN?"

Winner: Best Health Film - Édition Mars 2021



BIO


BILL MUDGE

RÉALISATEUR ET CO-PRODUCTEUR





Bill Mudge a passé plus de 16 ans chez Merrill Lynch en tant qu'analyste financier et développeur de logiciels, tout en obtenant un MBA à la Stern School of Business de NYU. Après avoir été consultant dans le monde des affaires, Bill a exploré en 2010 sa passion pour la réalisation de documentaires.


Il a suivi les cours de la San Francisco Film School en se concentrant sur l'étude des films documentaires. Au cours de la dernière décennie, Bill a produit et réalisé des courts métrages qui couvrent tous les sujets, des parachutistes au cancer, et des voiliers aux superbactéries.


"BEATING SUPERBUGS : CAN WE WIN ?" est son premier long métrage.


FILMOGRAPHIE


. 2017 Class R-69

. 2016 Airborne Demonstration Team

. 2012 Seeing Red: A Woman's Quest For Truth, Power and The Sacred

. 2011 Still Here: Living With Incurable Cancer

. 2011 War In My Body

. 2009 Home Afloat: Living On a Sailboat



Bonjour Bill, merci de nous recevoir pour nous en dire un peu plus sur votre film "SuperBugs", un sujet passionnant ! Première question, pouvez-vous nous expliquer comment et pourquoi vous avez fait ce choix professionnel assez drastique de quitter le monde des affaires pour celui du cinéma ?


J'ai toujours porté un grand intérêt aux arts. J'ai étudié l'histoire de l'art en premier cycle universitaire, et simultanément l'informatique, mais pas seulement parce que les perspectives d'emploi y étaient bien meilleures. Les deux matières me fascinaient. Bien avant d'étudier le cinéma, j'avais une collection de caméras, y compris une caméra vidéo, que j'utilisais de temps en temps pour divers projets.


J'ai réalisé quelques interviews d'amis, qui m'ont été inspirées par "Working", le célèbre ouvrage de Studs Terkel; sa démarche est de mettre sur le même plan le ressenti des gens dans leur vie professionnelle et dans leur vie privée. Ce qui m'a également amené à m'interroger sur mes propres activités professionnelles. Comme on pouvait s'y attendre, j'ai constaté que si j'étais très impliqué dans le monde de l'entreprise, je ne pouvais pas consacrer de temps à mes autres centres d'intérêt, comme la réalisation d'un film "en prise directe", de manière vraiment approfondie.


Après le décès de mon père, en 2009, j'ai compris que je ne devais plus attendre. Un an plus tard, après ma dernière mission en entreprise, je me suis inscrit à la San Francisco Film School pour un cycle diplômant d'un an.





Votre documentaire nous apprend, fait très frappant, que les "Superbugs", soit les bactéries résistantes aux antibiotiques, sont également des complices meurtriers des virus. En fait, le film s'ouvre sur cette information cruciale : les infections bactériennes sont "associées à la moitié des décès dus au Covid"!


Avez-vous pu rester en contact avec les scientifiques avec lesquels vous avez travaillé et vous tenir au courant des recherches en cours dans ce domaine ? Que pouvez-vous encore dire au public sur ce sujet ?


Nous sommes toujours en contact avec bon nombre de nos interlocuteurs, qui nous tiennent au courant des derniers développements de leurs recherches. Le Dr Fred Tenover, vice-président de Cepheid, nous a rappelé qu'un diagnostic rapide et précis était indispensable à l'établissement des traitements appropriés en cas d'infections virales et bactériennes. Par ailleurs, l'une de nos expertes, Helen Boucher, de l'université Tufts, a déclaré que la pandémie de COVID augmentait la menace d'apparition de superbactéries, les patients risquant de contracter à l'hôpital une infection secondaire qui peut parfois ne pas être traitée, les exposant à un risque accru de décès.


Dans les années 1980, les recherches d'Anthony Fauci ont révélé que, pendant la pandémie de grippe de 1918/19, les infections opportunistes étaient souvent la véritable cause de décès. Personne n'avait encore découvert les antibiotiques et la recherche sur les phages était très récente, pratiquement inconnue. À l'avenir, les superbactéries risquent de conspirer avec de nouveaux virus au fur et à mesure de leur apparition, rendant d'autant plus urgente la nécessité d'apprendre à les maîtriser.





Autre point important du film : on apprend que n'importe qui, n'importe où et à n'importe quel moment, peut être la proie d'une "super-bactérie". Espérez-vous que le film contribue à sensibiliser le public à ce sujet ? L'aspect éducatif du film documentaire est-il au cœur de votre choix d'adopter cette forme particulière ?


Nous avons un double objectif : rappeler aux gens le danger que présentent les superbactéries, leur étonnante diversité et leur portée —personne ne peut leur échapper. Mais nous voulons également montrer que de véritables solutions existent, de la prévention de base à la manipulation génétique la plus sophistiquée.


On voit émerger aujourd'hui un effort mondial pour coordonner et financer tous les moyens d'endiguer la propagation des superbactéries. On ne peut imaginer qu'un chercheur, ou un pays, puisse de façon isolée découvrir et appliquer les stratégies qui restent à mettre en place. Nous sommes face à une menace mondiale qui exige une réponse mondiale.





Certains des intervenants évoquent le rôle crucial des institutions et des grands groupes pharmaceutiques dans la manière dont est donnée la priorité à telle ou telle recherche - sujet brûlant en ce moment. Quel rôle et quel pouvoir pensez-vous que le public puisse avoir pour exiger que la santé mondiale passe avant le profit financier ?


Le profit et la santé mondiale doivent coexister. Que l'on aime ou que l'on déteste les grandes entreprises pharmaceutiques, les personnels, les processus et les moyens de production de masse et de très grande qualité, dont disposent ces organisations capitalistes pour tester et fabriquer de nouveaux antibiotiques, sont parmi les meilleurs au monde. À moins de découvrir comment les remplacer par des solutions viables et de très haute qualité, nous devons trouver comment inciter les entreprises dites "Big Pharma" à participer à la création de solutions antibiotiques. Et impliquer au même titre universités, start-ups et gouvernements. Aucune entité, aucun type d'organisation n'est susceptible de réussir à elle seule.


Il incombe au grand public de comprendre l'essence de toutes ces relations, afin de voter pour des politiciens qui soutiennent la science fondamentale, à la base d'un large éventail de solutions et de leur déploiement, et qui soutiennent également de nouveaux modes de financement. Ainsi, les atouts essentiels que l'industrie pharmaceutique peut apporter à la résolution de la crise des superbactéries pourront être appréciés et renforcés plutôt que simplement critiqués.





Comme spectateurs et "profanes", nous avons compris que les bactéries se sont adaptées pour résister à la consommation excessive d'antibiotiques à large spectre. Pouvez-vous voir un parallèle avec la situation actuelle, à savoir l'arrivée soudaine de vaccins à large spectre et le développement rapide de variants incontrôlables du virus, apparemment résistants aux vaccins ? Avez-vous eu l'occasion d'échanger avec des scientifiques sur ces sujets depuis que vous avez terminé votre film ?


Les experts nous disent que la résistance aux médicaments évolue plus rapidement que la résistance aux vaccins, en partie parce que les médicaments traitent les maladies, alors que les vaccins les préviennent. La prévention peut limiter la réplication, réduire les possibilités de mutations et la propagation vers de nouveaux hôtes. De plus, les médicaments (antibiotiques) attaquent beaucoup moins de sites-cibles que les vaccins.


Cela signifie que la résistance aux médicaments est plus susceptible d'apparaître en premier lieu dans les infections bactériennes et de se propager plus rapidement une fois qu'elle est apparue. En revanche, les vaccins empêchent l'infection et la transmission et induisent une immunité (anticorps protecteurs) contre de nombreux sites-cibles des agents pathogènes, ce qui rend plus difficile l'évolution de la résistance aux vaccins.


À ma connaissance, depuis qu'on a commencé à les utiliser, la plupart des vaccins ont toujours protégé les patients. Par exemple, la variole a été éradiquée, et aucune souche de virus à même de se transmettre entre individus vaccinés n'a jamais émergé. De même, à ce jour, rien ne permet de penser que le SRAS-CoV-2, ou toute autre souche du virus COVID-19, soient résistants aux vaccins actuellement disponibles.


Cependant, il arrive qu'on constate une résistance aux vaccins, ou la diminution de leur efficacité, tant chez les animaux que chez les humains. Par exemple, dans le cas de la maladie de Marek, une maladie des poulets causée par le virus dit herpèsvirus II de Gallid. Chez l'homme, la bactérie Streptococcus pneumoniae présente des signes de mutation en réponse au vaccin. Le virus de l'hépatite B humaine (VHB) a montré des adaptations similaires.


En même temps, parce que la résistance aux vaccins est rare, les vaccins sont désormais une solution de premier plan dans la lutte contre les superbactéries, c'est-à-dire les bactéries résistantes aux antibiotiques.





Pour en revenir au documentaire, qu'avez-vous appris de votre expérience dans la réalisation de votre premier long métrage ? Avez-vous des conseils à donner aux cinéastes en herbe ?


Oui, plusieurs remarques :


1. Choisissez un sujet qui compte vraiment. Il faut beaucoup de temps, d'énergie et d'argent pour réaliser un bon film, alors mettre la barre haut sur le choix du sujet s'impose.


2. La narration et la structure dramatique peuvent changer de manière significative à mesure que vous en apprenez davantage sur votre sujet, surtout s'il s'agit d'une "cible mouvante" comme la nôtre.


3. Résister à la tentation d'entrer dans les détails : il vaut mieux se concentrer sur des personnages charismatiques, les défis auxquels ils/elles doivent faire face, ainsi que quelques concepts et statistiques clés qui viennent illustrer leurs récits. En fin de production, vous aurez probablement renoncé à bon nombre de vos "bonnes idées" de départ.


4. Utiliser quelques exemples clés, mais veiller à ne pas perdre de vue quelle stratégie sous-tend votre message. Cela contribuera à allonger la durée de vie du film. Dans notre cas, si nous avons donné quelques exemples représentatifs des découvertes les plus significatives, nous étions conscients que les recherches sur la résistance aux antibiotiques se poursuivraient de façon continue.


De manière plus générale, les solutions efficaces reposent également sur la sensibilisation du public et la coordination des diverses organisations qui mettront ces découvertes à la disposition du grand public. Ces tendances se confirment alors même que la science progresse.


5. Au cours du montage, vous serez confrontés à des conflits d'ordre créatif : savoir faire des compromis est vital pour pouvoir avancer.


6. N'abandonnez pas parce que tout un tas de fondations refusent les unes après les autres vos demandes de subventions ; continuez, même si cela signifie gérer en interne une part importante du travail que vous pensiez faire sous-traiter.


7. Quoi qu'il arrive, il se passera bien plus de temps que vous l'avez estimé avant que votre film soit prêt à être distribué.


8. Toujours garder en tête le mantra de PBS Nova : dans un film comme "Beating Superbugs : Can We Win ?", on "raconte l'histoire humaine derrière la science."





Pensez-vous qu'à un moment donné, vous pourriez écrire une fiction, un autre type d'histoire, qu'elle soit inspirée ou pas d'une histoire vraie ? Ou pensez-vous vous en tenir au documentaire et si oui, pourquoi?


Tout dépendra des opportunités qui se présentent. Il est cependant probable que nous continuerons à produire du documentaire, puisque c'est là que nous avons rencontré le plus de succès jusqu'à présent.





Opinion sur le cinéma post-covid :


. Plus de streaming que jamais, au détriment des cinémas.


. Le streaming, bien qu'évidemment pratique, diminuera la proportion de spectateurs qui finissent effectivement de regarder un film donné. Il y a peu à perdre de passer d'un film à l'autre par rapport au fait de se lever et de quitter une salle de cinéma.





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